Au 3ème siècle, l'Empire romain occupe tout le pourtour de la Méditerranée. L'empereur est alors Constantin, et grâce à lui l'empire est devenu chrétien, après 3 siècles de combats acharnés contre le christianisme qui était considéré comme une secte "athée" et dangereuse.
La capitale est toujours Rome, mais Constantin désire déplacer cette capitale vers l'orient, car la politique de l'époque voulait affermir l'Empire dans cette partie. De plus, Rome est trop peuplée.
Son choix s'est porté sur une minuscule bourgade, située sur le détroit du Bosphore, à un emplacement stratégique, ville qui avait été autrefois une colonie grecque: Byzance, devenue romaine avec Caracalla (195 ap.JC).
Cet emplacement relie les 2 continents, l'Europe et l'Asie, et constitue un site exceptionnel pour contrôler le commerce et assurer une ouverture vers l'Est. De plus, n'y voit-on pas aussi 7 collines, comme la Ville éternelle ?
Aussitôt des travaux gigantesques sont entrepris, en 324: temples, aqueducs, palais, ... toute une ville est construite par de brillants architectes de tout l'empire afin d'accueillir l'Empereur. Celui-ci y emménage 6 ans plus tard, alors que la ville n'est pas tout-à-fait terminée, et la rebaptise Constantinopolis, 2ème capitale de l'Empire.
Mais l'Empire est trop vaste: on ne peut pas à la fois être au four et au moulin, et l'empereur Théodose le partage en deux en 395 entre ses 2 fils: la moitié ouest a pour capitale Rome, la moitié Est Constantinople, avec donc 2 empereurs romains (Honorius pour l'ouest et Arcadius pour l'est).
L'Empire romain d'occident s'éteindra en 476, étouffé par les barbares, qui ont pillé Rome les uns après les autres, attirés par ses richesses (le dernier empereur a été Romulus Augustule). La moitié orientale, épargnée par cette première vague, résistera 1000 ans de plus et ne s'éteindra qu'en 1453, après une longue histoire mouvementée, plutôt méconnue de notre civilisation occidentale !
Constantinople au 6ème siècle |
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Comme Rome, Constantinople était alimentée en eau par des aqueducs (et un immense réservoir souterrain, que l'on peut voir encore aujourd'hui), mais il y avait parfois pénurie d'eau, et l'eau arrivait alors par bateaux. Le blé arrivait aussi par voie maritime. De nouvelles routes commerciales ont été ouvertes, en particulier la route de la soie avec la Chine.
Un immense hippodrome a été construit au bout de la péninsule, et des courses fabuleuses s'y déroulaient, devant l'empereur. Les équipages avaient des couleurs; la couleur rouge était réservée à l'empereur. Le peuple avait ses couleurs favorites: les Verts et les Bleus. Ces "factions" rivales, et impliquées dans la vie politique, ont même provoqué une guerre civile, dite "sédition de Nika", en 532. |
Pour calmer les esprits, l'empereur (Justinien) a commencé la construction de l'église Sainte-Sophie, située judicieusement à côté de l'hippodrome, et qui sera terminée 5 ans plus tard en 537. La taille maximale de l'enceinte de la ville fut atteinte en 820 (commencée sous Théodose II). Constantinople deviendra une des plus grandes villes du monde, pendant de nombreux siècles. |
Les gens parlaient principalement le grec, malgré les efforts des premiers empereurs de généraliser le latin dans cette partie du monde. C'est pour cela que nos historiens ont appelé l'Empire Romain d'Orient: l'Empire Grec, ou l'Empire Byzantin. En tout cas, les habitants se sont dits "Romains" jusqu'au bout (en 1453), et même leurs voisins (les Arabes et les Turcs) les appelaient ainsi. Par contre, nous, en occident, on les appelle les Byzantins, car Romain est pour nous synonyme de Romain d'occident, porte le glaive et n'habite pas loin de Rome.
La grande préoccupation du peuple, avec les courses de chevaux, était la religion (remarque: les jeux du cirque avec les gladiateurs avaient été interdits depuis Constantin). Grégoire de Nysse en voyage à Constantinople au 4ème siècle écrivait (lors de la querelle arienne) :
Même les artisans et les esclaves se sont mués en subtils théologiens et prêchent dans le rue. Si vous demandez de la monnaie, le changeur, au lieu de vous donner votre argent, vous parle de l'Engendré et du Non-Engendré. Si vous demandez le prix du pain, le boulanger, au lieu de vous l'indiquer, s'applique à vous démontrer que le Père est plus grand que le Fils. Si l'on veut se baigner, le préposé vous déclare que le Fils, assurément, ne procède de rien.
L'Empire Romain d'Orient a aussi engendré des "fous de Dieu". Par exemple les stylites. Ils avaient fait le vu de vivre au sommet d'une colonne, à l'exemple de Siméon. Le stylite ne se coupait jamais les cheveux (qui poussaient jusqu'aux pieds) et dormait recroquevillé. La nourriture ? Des bénévoles la lui passait. Il était vénéré comme un saint, et des gens venaient de très loin dans l'empire pour le voir. Parfois, on édifiait à côté une colonne un peu plus haute, et une fois terminée le stylite y déménageait (lors d'une cérémonie, avec une échelle). Il y avait aussi les moines gyrovagues qui erraient constamment entre deux villes, des reclus qui s'emmuraient dans une caverne, des kelliotes qui se mettait dans un espace où il ne pouvait plus presque plus bouger, et même des brouteurs qui ne se nourrissaient que d'herbe. Ces véritables "athlètes de Dieu" étaient si populaires qu'ils perdaient souvent leur isolement.
Plus sérieusement... Après la chute de l'Empire Romain d'Occident en 476, l'Empire Romain d'Orient a réussi à reconquérir certains territoires sur les barbares en occident:
Voici une liste de quelques empereurs romains d'orient célèbres, par ordre chronologique:
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La ville de Venise était très en commerce avec Constantinople, et les chevaux de la place St-Marc proviennent de l'Hippodrome (emportés quelque peu brutalement il est vrai, par les Croisés...)
Au fil de l'histoire, les guerres menées contre l'Empire Romain d'Orient furent nombreuses:
Ce qui aura marqué cet Empire tout au long de son existence, ce ne sera pas la science (les Arabes s'en occuperont au 8ème siècle, à partir du passé grec), mais la philosophie et la religion. Dès les premiers siècles, les dogmes (croyances) du catholicisme seront en grande partie énoncés dans l'Empire Romain d'Orient (Constantinople, Nicée, Alexandrie, Ephèse).
Plus tard, l'empire romain d'orient sera marqué par les crises icônoclaste (on cassait les images religieuses, ou "icônes") puis icônodule (on les vénérait).
D'ailleurs, le fossé entre l'occident (parlant latin) et l'orient (parlant grec) se creusera, à tel point que la religion catholique se scindera en deux (ce qu'on appelle schisme): à l'ouest: les catholiques romains, à l'est, les catholiques orthodoxes. Deux mondes qui ne se comprennent toujours pas actuellement... Les orientaux traiteront toujours les occidentaux de barbares (en disant que les vrais Romains, c'est eux), ce qui se révèlera vrai en 1204, lors du sac de Constantinople par les Croisés: des aventuriers sans scrupule, brutes épaisses ne respectant rien, que les Arabes et les Romains d'orient ont appelés avec mépris "les Francs".
Sinon, l'empereur (βασιλευσ = basileus en grec, à partir de Héraclius = Héraklios), tout de pourpre habillé, sera entouré d'une espèce d'aura, et sera inaccessible du peuple (quasiment divinisé), phénomène typique de l'Empire Romain tardif (aussi en occident), mais aussi de la mentalité orientale. La femme de l'empereur sera aussi adulée que son mari; elle sera un modèle en matière de piété religieuse.
L'empereur avait parfois son propre historien dans sa cour, comme par exemple Procope l'a été pour Justinien. Procope a écrit des livres en grec. Le plus célèbre étant "Histoire secrète", car Procope livre là de nombreux secrets sur ses maîtres, mais aussi la guerre contre les Vandales.
L'histoire de l'Empire Romain d'orient est aussi pleines de querelles intestines, souvent extrêmement cruelles. L'expression est restée chez nous d'armées byzantines. Par exemple, Justinien II fit fouetter sa mère par son eunuque, ou brûler des débiteurs insolvables par son moine. Un clan invitait un autre à un repas, puis le renversait, mettait le plancher dessus et continuait le repas, ou Théodose II qui se complaisait dans l'enfance, c'est sa sur Pulchérie qui commandait.
Lors des croisades, Constantinople accueillera (en tant que dernière base chrétienne) les Croisés devant se rendre à Jérusalem. Hélas, ceux-ci, aveuglés par toutes ces richesses, pilleront Constantinople en 1099 et 1204, et instaureront un gouvernement composé de Gênois, Flamands, Vénitiens, chevaliers de Malte, Normands, Français, Anglais, Teutons, etc... avec Godefroy de Bouillon, Baudoin de Flandre, Simon de Montfort, ... Le quartier "latin" s'est ensuite appelé Galata (mot dérivé de Gaulois). Cela explique comment les Croisés revenaient plus riches en France.
Après cette époque, les Romains d'orient, qui avaient repris leur capitale Constantinople et qui n'étaient plus cantonnés que là (Andrinople (Édirne) était déjà la capitale provisoire des Turcs ottomans: échange de capitales), se sont résignés à être englobés un jour ou l'autre par les Turcs, malgré qu'ils avaient encore l'espoir d'être aidés par les occidentaux (au nom du christianisme). Mais ils préféraient de loin l'occupation turque à celle des occidentaux. De toute façon, à cette époque, les occidentaux étaient bien occupés chez eux, et ils en avaient marre des croisades. Seule Venise se sentait un peu concernée. Le dernier empereur romain (encore un Constantin, comme Romulus était le dernier empereur de Rome, clin d'il de l'Histoire) est mort au combat, devant la porte des Blachernes, lors de la prise de Constantinople par les Turcs en 1453 (Mehémet II).
Comme lorsque les Arabes ont investi Jérusalem, les Turcs ont respecté la population; par contre, Sainte-Sophie a été transformée en mosquée, puis en musée.
Après cette victoire, les Turcs adopteront rapidement les thermes, qu'on baptisera bains turcs, car ils les ont propagés surtout pendant toute la période de l'Empire ottoman, jusqu'en Afrique du Nord (où ils existaient déjà du temps des Romains).
Constantinople n'a été baptisée Istanbul que très récemment (vers 1920), par le grand réformateur nationaliste Mustapha Kémal, appelé Ataturk, pour "désoccidentaliser" ce nom et plus marquer l'attachement de cette ville à la Turquie, en même temps qu'il plaçait la capitale à Ankara, située plus au centre du pays.
 
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